En tant que traducteur indépendant, on est souvent amené à travailler avec des agences ou des clients directs dont le siège se trouve ailleurs que dans le pays de résidence du traducteur. C’est sans doute d’ailleurs l’une des premières professions à prendre le train de la numérisation et à travailler aussi rapidement de manière complètement dématérialisée. Je pensais faire de cette introduction un article sur la TVA et puis je me suis ravisé en me disant que c’est la fin de l’année et « un peu de légèreté, que diable ! ». La TVA attendra janvier 2021.
2009 : première réponse positive
J’ai commencé à travailler en tant que traducteur en 2009. Mon tout premier contact était une traductrice canadienne, Lise, qui avait besoin d’aide pour un projet un peu trop ambitieux pour une seule personne. Je n’ai jamais vu, ni même téléphoné avec Lise. L’intégralité de notre collaboration s’est faite par courriel. Cela tombe sous le sens aujourd’hui, mais en 2009, il y a à peine plus de dix ans, c’était l’apogée de Facebook, les débuts de Twitter, un monde sans Instagram, ni WhatsApp et un internet mobile encore peu répandu. Google Translate était un désastre avant de devenir la menace que l’on connaît aujourd’hui et n’offrait que quelques combinaisons linguistiques limitées.
Alors que je me débattais pour décrocher une bourse d’études, passer les entretiens d’entrée et remplir toute la paperasserie en temps et en heure pour intégrer un master à la Dublin City University tout en gérant un boulot de vendeur à temps plein, et un déménagement imminent, je n’ai rien trouvé de mieux que de chercher à décrocher des missions de traduction pour avoir une première expérience en la matière, surtout en tant qu’indépendant.
Traducteur débutant (et en devenir)
Loin de me douter de ce que la traduction pouvait englober, j’ai répondu à une annonce sur un site dont j’ai oublié le nom et qui n’existe sans doute plus. Contre toute attente, Lise, la traductrice, a répondu à mon message par la positive et je me suis retrouvé à traduire le chapitre 2 d’un livre ésotérique sur le développement de soi. Lise au Canada, moi en Irlande, travaillant sur un seul et même projet. Plein de bonne volonté, j’ai traduit un document Word sur Libre Office, passant d’un document à l’autre sur un ordinateur portable aux capacités très réduites, courbé sur ma table de cuisine. Impensable de travailler ainsi aujourd’hui !
Pourtant cette traduction m’a servi de tremplin. Les retours de Lise, traductrice aguerrie et expérimentée, furent très positifs, surtout pour une traduction sans l’utilisation d’un correcteur orthographique (!) et des ressources en ligne limitées. Fort de ces encouragements, j’ai poursuivi dans cette voie et décroché mon master en traduction en 2011, tout en collectant régulièrement des missions de traductions ponctuelles.
L’autre précieuse leçon que Lise m’a enseignée, c’est que se faire payer n’est pas toujours automatique ! Après m’avoir gentiment fait patienter pendant une année, prétextant un « marasme financier » dans lequel elle se trouvait, j’ai finalement abandonné et décidé de renoncer à ma première facture.
Traducteur indépendant expert (et en devenir)
Au fil des mois durant lesquels j’étudiais à la DCU, j’ai peu à peu découvert les rouages du métier. J’ai établi un système de facture plus organisé et plus professionnel, la première année exempte de TVA. J’ai découvert Translators Café et surtout ProZ qui m’ont permis de trouver pas mal de clients et d’agences. J’ai appris la facturation au mot source, les tarifs pratiqués, l’importance de la relecture par un autre traducteur. Puis l’utilisation d’outils de TAO, à l’époque Trados était déjà la référence en la matière avec encore très peu d’alternatives viables. Les difficultés avec les agences qui exigent une réponse sous 30 minutes sous peine de perdre le projet. Celles qui ne savent pas qu’il existe différents fuseaux horaires…
Le métier de traducteur est un très beau métier. Très différent de ce que je m’imaginais avant de le pratiquer et très différent aujourd’hui de ce que j’ai appris en 2010-2011. Les difficultés sont nombreuses, bien au-delà des défis que les langues représentent en soi. Il exige, comme beaucoup d’autres métiers, une formation constante et une curiosité dans de nombreux domaines, aussi techniques que légaux. Loin d’avoir maîtrisé tous les aspects du traducteur indépendant à succès (homme d’affaires, comptable, doué dans les ventes, le marketing et le service client), je crois que ces mots encourageants de Lise ont énormément compté dans ma démarche et m’ont donné envie de persévérer dans cette voie.